10 novembre 2010

L'évolution des études: conseil, coaching et créativité

horizon, sodpme et ghomore.jpgLe SEMO 2010 auquel nous avons participé et où nous avons peut-être eu la chance de vous rencontrer, ainsi que le dernier dossier Etudes de CB News, confirment l'évolution que nous avons constatée depuis plusieurs années: fort heureusement, les études ne s'orientent plus vers le lancement de nouveaux outils gadgets, mais vers une recherche de valeur ajoutée d'intelligence et de conseil. Qu'entendons-nous exactement par ces mots ?

Rappelons que dans une première période, on demandait aux instituts de livrer des données brutes, le client se réservant la capacité de les analyser et d'en tirer les conclusions opportunes. Si c'est de plus en plus rare, on note toutefois, avec la crise actuelle, des résurgences ponctuelles de ce type de demande. C'est ainsi que pour des raisons économiques ou par nécessité de prendre rapidement une décision "pour action", certains clients peuvent nous demander parfois de s'occuper juste du recrutement, des entretiens et de l'animation, en s'occupant des analyses et des conclusions.

Dans une seconde phase, on attendait d'un institut qu'il apporte une plus-value d'explication des opinions émises et des comportements constatés. En qualitatif, cela amène à juger des instituts sur leur capacité à aller au delà du déclaratif des entretiens individuels ou des réunions de groupe, en faisant ressortir des facteurs latents, des éléments d'image symboliques, des motivations et des freins plus ou moins inconscients. Dans ce cas de figure, encore fréquent aujourd'hui, même si le rapport d'étude fournit des conclusions concrètes, le client ne souhaite pas forcément que l'institut aille au-delà de ce rôle d'éclairage. Il  peut en effet préférer se réserver les préconisations concrètes en pensant qu'elles ne doivent pas contaminer l'analyse de l'institut, ou juger qu'elles sont du seul ressort de son Agence lorsque cette dernière lui fournit une prestation de conseil.

Avec la crise, on souhaite que l'institut participe davantage, en donnant également des conseils et des recommandations, en apportant sa propre connaissance du marché et du consommateur, en plus de ses analyses et de ses explications. Plusieurs raisons expliquent cette évolution: le client a de moins en moins de temps à consacrer à chaque dossier, il doit prendre des décisions de plus en plus rapides, avec des effets opérationnels visibles ; parallèlement, le consommateur est devenu versatile et multi-facettes, il se comporte souvent comme un système instable en informatique, des données fiables étant de plus en plus difficiles à recueillir et à réunifier dans une vue cohérente. D'où le besoin de l'aborder avec des méthodologies multi-facettes, avec selon les cas des méthodes ethnologiques sur le point de vente, un vidéo-journal et des carnets de bord à domicile, des entretiens ou réunions de groupe lorsque c'est nécessaire, voire du recueil on-line. Le nouveau rôle de l'institut est non seulement de conseiller parmi les multiples outils et approches désormais possibles, mais aussi de réunifier les différents éclairages souvent divergents, de dégager les grandes lignes de conclusion, de se "mouiller" en proposant des conseils et des préconisations concrètes qui s'inscrivent dans une vision d'ensemble cohérente -voire d'accompagner le changement en apportant un véritable suivi du conseil. C'est pourquoi, après des contrats à l'année qui servaient uniquement, il y a quelques années, à diminuer les frais de chaque étude, on voit désormais apparaître des contrats à l'année incluant un temps de conseil en amont, et un temps de suivi en aval.

innovation(2).jpgEn qualitatif, l'institut évolue ainsi vers un rôle de partenariat et de "coaching" qui peut déborder les frontières traditionnelles des études, en allant par exemple vers le consulting et l'aide à l'innovation. De nombreux consultants sont venus nous voir au Semo pour nous demander comment intégrer, en plus de leur benchmark, dans leur audit et/ou avant leurs conseils concrets, des phase de bilan et d'étude. Là encore, il s'agit moins de leur livrer des données brute que d'intervenir dans un véritable partenariat, la démarche d'étude venant nourrir une réflexion commune qui se fait à trois: institut, client, consultants.

De même, la prise en considération du consommateur, non plus comme un simple objet passif qu'on analyse de l'extérieur, mais comme un véritable acteur et sujet qui participe à la recherche, par exemple en réalisant et faisant évoluer son vidéo journal ou en fournissant des idées d'amélioration d'un service ou produit sur plusieurs semaines, amène à nourrir de nouvelles phases de créativité et de recherche en innovation. Les recherches d'insight à partir de résultats d'étude ont été le premier signe de cette évolution, puisqu'on comprenait pour la première fois qu'une véritable innovation ne pouvait se faire qu'en étant à l'écoute active des visions du consommateur. Car contrairement aux idées reçues qui veulent réserver les inventions aux seuls créatifs d'agence ou aux grands génies solitaires, lorsqu'on sait suivre le consommateur et amorcer avec lui une recherche créative, cela peut se révéler à la source de milliers d'innovations pertinentes. C'est ce qu'affirment avec force des auteurs américains comme Karim Lakhani de la Harvard Business School, ou encore Chris Andersen et le mouvement "do it yourself" , qui traquent l'intelligence collective des consommateurs pour trouver les innovations de demain.

Création d'un véritable lien de partenariat entre le client et les études, extraction d'une intelligence des études comme il existe une intelligence économique et sociale, coaching et suivi de la problématique du client: tels sont les nouveaux visages passionnants qui attendent notre métier, sans parler de son extension vers le consulting et la créativité d'innovation, pour ne parler que de ces nouveaux territoires !

 

05 juillet 2010

Le nouveau consommateur en temps de crise, entre arbitrage rationnel et émotion

émotion1.jpgLes vacances approchent, mais la crise, loin de reculer, s'apprêterait selon de nombreux spécialistes à repartir de plus belle à la rentrée, en suivant un cycle en "w": après le pic de l'automne 2008, puis une timide reprise provoquée par des soutiens financiers massifs, elle rebondirait pour un nouveau tour, à la fois à cause d'une absence de solution globale depuis deux ans, et à cause de l'endettement de plus en plus préoccupant des Etats.

Même si le mot de rigueur est toujours tabou, les Français ont bien compris qu'ils allaient devoir se serrer la ceinture. Tel est le premier constat avec lequel il va falloir vivre: les clients et les consommateurs seront de plus en plus amenés à arbitrer entre leurs dépenses, certains pouvant même être tentés par une dé-consommation volontaire. D'où la mise en place de nouveaux comportements et de nouvelles valeurs, que nous avons pu analyser lors d'une étude sur les changements de comportement alimentaires d'un échantillon de Français touchés par la crise.

Cela ne signifie pas que les achats plaisir, voire les achats gadgets, vont disparaître: les succès de l'i-pad et de l'i-phone 4 , malgré leurs  défauts, témoignent bien du fait que les consommateurs peuvent se priver sur certains postes pourtant jugés indispensables, pour accéder au dernier gadget qui leur permettra de récupérer un peu de valorisation et d'estime de soi. Car, parallèlement aux arbitrages rationnels, on assiste à un besoin viscéral de réassurance émotionnelle, pour répondre aux angoises de la crise. D'où l'intérêt des méthodes d'investigation qualitatives les plus aptes à saisir cette sphère subjective et émotionnelle, que ce soit par des entretiens et des groupes, par des observations participantes, par la vidéo ou le vidéo-journal intime, tenu par les participants eux-mêmes.

Encouragé par la presse people et par l'instantanéité du net, ce nouveau culte de l'émotion semble gagner tous les domaines: les médias vendent moins de l'information  que de l'émotion, les hommes politiques cherchent la phrase qui suscitera une adhésion affective, les entreprises et les agences de publicité partent à la quête de l'émotion positive adéquate, qu'ils mettront en avant pour mieux vendre leur produit. C'est ainsi que BMW se contente, dans sa dernière publicité, de jouer simplement sur "la joie".

Il ne faut pas pour autant tout réduire à l'émotion. Ce serait oublier que le consommateur actuel se décide à la fois à partir de critères émotionnels et d'arbitrages rationnels, comme nous l'avons vu au début de ce billet, et que tout le travail d'une analyse sérieuse consiste justement à bien saisir le réglage entre ces deux domaines. C'est ce que nous tentons de faire pour nos clients, ce qui sera plus que jamais nécessaire à la rentrée.

Notre institut prenant ses vacances entre le 12 Juillet et le 20 Août, il nous reste à vous souhaiter de bonnes vacances, ou une pèriode de travail plus calme si vous ne partez pas, en profitant de cette parenthèse annuelle pour recharger vos batteries et accumuler... plein d'émotions positives!

Christian Miquel