17 décembre 2008

Voeux et remarques de fin d'année

Plutôt que la note sur l'école qualitative de Chicago remise à Janvier, à une semaine de Noel je préfère vous envoyer nos voeux et quelques réflexions plus légères sur l'actualité.
En regardant les emails et spams qui encombrent chaque matin ma boite à lettre électronique, je n'ai pu m'empêcher de me dire que leur nombre en croissance exponentielle depuis un mois, et surtout leur nature, reflètent bien les préoccupations actuelles : "on rachète vos crédits, ne laissez pas fondre vos bénéfices" disent ainsi des accroches involontairement humoristique. D'autres secteurs bien mal en point et habituellement fort peu sexy tentent de relancer la consommation en favorisant le consumérisme : "comparez les offres de 41 assureurs". Sans oublier les services supplémentaires et les réassurances du client qui devraient déclencher automatiquement l'achat magique de fin d'année: " expédition sous 24h chrono, livraison garantie avant Noël" . Car l'essentiel des offres concerne bien entendu des cadeaux que le Père Noël semble avoir cette année du mal à faire entrer dans sa hotte. Ainsi les offres de tourisme (-20% de réservation en Novembre) affluent en me faisant, et vous faisant probablement rêver de partir ailleurs oublier tous ces tracas: "Nos plus belles destinations au soleil, encore de la place à la neige, le luxe à petit prix, séjour inoubliable, -50% sur nos séjours !" Et pour craquer sur ces offres dépaysantes ou sur les produits high tech, l'ultime argument: "coup de folie... urgent cadeaux, sans oublier l' inénarable :"l' hystérie débute à 10h!"
Ces petits réflexions pour inviter chacun de nous à considérer d'un autre oeil tous ces "pourriels" qui nous encombrent chaque matin. Ils peuvent peut-être, eux aussi, nous renseigner sur l'air du temps et les préoccupations du moment, parfois avec un humour et une poésie du quotidien involontaires. Et surtout ils nous montrent qu'en cette pèriode difficile, des entreprises et des responsables se bougent pour réagir et s'adapter. Car les époques troubles sont aussi pleines d' occasions et d'opportunités à saisir. C'est ce que nous vous souhaitons, pour vos projets de 2009, avec tous nos voeux de réussite!
Claire Couratier et Christian Miquel

04 décembre 2008

METHODOLOGIES EN TEMPS DE CTRISE, suite: LES REUNIONS DE GROUPE

Deuxième volet de notre réflexion sur l’adaptation des méthodologies d’étude en temps de crise, en s’intéressant cette fois-ci aux réunions de groupe, dont les coûts de recrutements et de locations de salle ont connu une surenchère constante, et dont la fiabilité implique de ne jamais pouvoir se contenter d'une seule réunion. Rappelons en effet que dans 75% des cas, un second groupe réalisé sur le même sujet donne une opinion significativement différente du premier groupe témoin !
Delphine Dion rappelle (in La revue des marques, octobre 2008) qu'un autre biais structurel des groupes est de réunir artificiellement des consommateurs dé-contextualisés dans un lieu étranger, en leur demandant ensuite de reconstituer abstraitement, et sous le regard jamais neutre d'autrui, leur vécu et les raisons de leur comportement. En invitant de plus les clients à les regarder derrière une glace sans teint comme dans un aquarium, elle fait remarquer avec humour qu’on reconstitue inconsciemment le modèle de ce que Malinowski appelait l’ « ethnologie de véranda » des coloniaux qui invitaient les bons sauvages à venir leur parler sur leur terrasse de leur vécu et de leurs croyances, sans se douter de l’aspect artificiel de la situation.

Et si on passait de ces « réunions de véranda » à des «réunions sur le terrain» comme l’ont fait les ethnologues ? On peut s’inspirer pour cela des chercheurs en Sciences sociales de l’école de Chicago (objet de notre prochaine note). Rappelons qu’ils ont connu lors de la grande crise des années 1930 un grand succès en proposant, en alternative aux enquêtes quantitatives ou qualitatives lourdes et chères, de revenir à l’observation, en menant notamment des réunions dans le lieu où vivaient les communautés qu’ils analysaient.
De nos jours, on peut de la même manière choisir d’organiser certains focus groupes chez les clients ou consommateurs, afin d’analyser « in situ » comment les gens d’un même milieu ou entourage parlent et échangent sur le produit concerné et sur ses concurrents. De cette manière, les propos obtenus sont plus authentiques, correspondent plus à ce que se disent les « vrais gens » entre eux.
Concrètement, cela revient à organiser, sur une durée de 2 heures, plusieurs mini-réunions de 5 personnes, en choisissant une personne-ressource qui va inviter chez elle des gens de son entourage non familial, dont elle donne les coordonnées et qui sont contactées par l’institut pour vérifier les quotas. Il peut s’agir d’utilisateurs du même produit, ou plus intéressant de produits de marques concurrentes, dont ils parlent et qu’ils peuvent être amenés à utiliser en cours de réunion de manière concrète, en situation, en confrontant leurs différences. La réunion se fait chez la personne-ressource, dans son salon ou autour d’une table, dans une ambiance décontractée et habituelle, l’animateur introduisant de manière plus naturelle les différents stimuli et inputs prévus.

L'interview préalable au groupe constitue également une alternative quand on ne peut réaliser deux phases successives d'entretien et de groupe. Pour éviter les biais d'un discours décontextualisé et influencé par autrui, il est en effet possible de faire venir les participants au groupe de manière légèrement décalée et d'en profiter pour les interroger de manière individuelle en profondeur pendant dix à quinze minutes, de façon notamment à recueillir toutes leurs pratiques, leur factuel de consommation ou d'usage personnel et au foyer, voire leurs premières motivatons et freins, autant de ssujets toujours très pauvres et sujets à caution en groupe.
Cette phase d'entretien préalable peut se faire grâce à un questionnaire auto-administré pour les questions factuelles, ou par un mini entretien individuel pour les analyses de motivation et de frein. Elle a le double avantage de recueillir un matériau plus fiables qu'en groupe, et de re-contextualiser inconsciemment le participant en l'amenant à revoir ses pratiques et habitudes juste avant de commencer le groupe.