24 avril 2013

Etudes, Marketing, R&D: Gérer l'imprévisibilité en temps de crise

Les conférences du Semo sur l'imprévisibilité ont été bien intéressantes, notamment avec des éclairages différents des personne qui sont intervenues sur ce thème:

implosion.jpg-Erik Grab, pour Michelin, a montré la nécessité d'une prospective qui intègre dans l'entreprise, en plus des départements traditionnels de R&D par branche, des cellules transversales ouvertes à l'imprévu... tout en illustrant avec humour les limites de la prospective. Ainsi les 4x4 continuent-ils à se développer malgrè toutes les prévisions logiques et rationnelles qui avaient annoncé leur fin.

-Jean Paul Lugan, coach et ancien sportif de haut niveau, a rappelé comment il est vital de s'appuyer en toute confiance sur son équipe pour réagir en quelques secondes. C'est une question de vie ou de mort lorsqu'une crise d'angoise ou de panique saisit un alpiniste, à 6.000 m d'altitude.

-Michel Augustin a fait part de son enthousiasme et de sa politique de "trublion du goût"  qui l'amène à surfer sur les évènements et à réagir à l'imprévu au quart de tour, en détournant par exemple à son avantage le lancement imprévu des 2 vaches de Danone, au moment même où il lançait son nouveau produit la Vache à boire: il lui a suffi de bricoler 2 voitures, et de  les installer face à l'endroit où étaient invités tous les journalistes !

-Michel Hebert, ex vice-pdt de Tbwa, a accentué comme tout homme de publicité le trait d'un air martial et guerrier, en affirmant dans la conférence suivante qu'il faut en temps de crise se comporter comme des commandos de terroristes ou du GIGN, vigilant et prêt à répondre coup par coup. Sans savoir vraiment contre quoi et contre quels moulins à vent il invitait ainsi à se battre... la crise, peut-être ?!  

-Sans aller jusque là, j'ai quant à moi prôné une attitude d'ouverture vigilante à ce qui se passe dans son entourage et qui sera de toutes façons  forcément imprévisible, tout comme sont imprévisibles notre naissance et notre mort -et les aléas de la vie personnelle et profesionnelle qui se déroule entre les 2 ! Car l'imprévisibilité est constitutive de notre condition humaine, mais ausi de la connaissance, comme en témoignent la physique quantique ainsi que la relation d'incertitude de Heisenberg qui a définitivement montré comment l'observateur et son instrument d'observation, conditionnent et changent la réalité même de ce qui est observé.

images (33).jpgProfessionnellement, face à un consommateur dont l'imprévisibilité a encore augmenté avec l'entrée simultanée dans un monde digital, d'hyperchoix et en même temps de crise, savoir gérer l'imprévisible implique de s'habituer à la relativité, en variant les éclairages sur le consommateur: il faut savoir l'interroger de manière multidisciplinaire avec de l'ethnologie, de l'observation, des entretiens, des groupes, de la vidéo, voire du on-line.

L'usage à bon escient de ces différents éclairages permet de cerner ses multiples identités et comportements lorsqu'il est shopper en magasin, avatar sur internet, influencé par le regard des autres en réunion de groupe, ou dans son environnement quotidien au foyer, chacune de ces positions topologiques et des instruments utilisés, donnant des résultats souvent sensiblement différents, qui sont autant de points de vue complémentaires sur le même monde.

D'où le besoin d'une nouvelle  approche d'un monde complexe, par une pensée  complexe chère à Edgar Morin, qui ne se contente plus des approximations pareseuses et simplificatrices des études d'antan, ou des intuitions d'un directeur d'étude jouant au gourou. Il faut pour cela, après un choix méthodologique pertinent d'outils variés, reconstituer et recoller les différents morceaux du réel ainsi observé -notamment grâce à une analyse systémique ou holistique, capable de restituer chaque paramètre dans son contexte.

Une fois ces informations à disposition, il faut encore  savoir les oublier, les transcender, pour ne pas rester prisonnier des Etudes et d'un savoir figé. C'est pourquoi il est nécessaire, non seulement de ne pas avoir peur d'affronter un monde et des données complexes, mais aussi de porter à partir de là un regard neuf et vigilant à ce qui se produit à chaque instant sur son marché, toujours à la quête d'insights et de cet imprévisible qui, de toutes façons, se produira fatalement, et qu'il faut juste apprendre à acceuillir, avec un maximum d'atouts à sa disposition. Cela s'apprend et se cultive aussi, comme dans les arts martiaux, où il est important de s'entraîner, d'acquérir des connaissances et des technqiues variées, pour laisser finalement son intuition et son ouverture créative répondre à la situation du moment...

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