12 avril 2010
Florence Aubemas, Gunter Wall et les enquêtes par immersion
Nous finirons le panorama des techniques vidéo et ethnologiques commencé dans les blogs précédents en nous intéressant aux techniques d'immersion, brusquement revenues au goût du jour avec la publication récente de deux livres.
Florence Aubenas a été la première à remettre au goût du jour les techniques d'investigation par immersion, qui consistent à s'immerger dans le vécu des personnes qu'on souhaite comprendre, en partageant leur vécu et en se faisant employer pour réaliser le même travail qu'elles. C'est ainsi que, pendant six mois, elle est devenue femme de ménage sur les ferry à quai de Ouistreham, pour mieux comprendre la réalité du travail précaire de ces salariées qui gagnent à peine le Smic, en étant obligées d'enchaîner des employeurs différents pour s'en sortir. Son livre, "Le quai de Ouistreham", relate magnifiquement cette expérience, et représente l'un des succès de librairie inattendu de cette année.
Selon ses propres déclarations, elle suivait en cela l'exemple de Gunter Wallraff, son "maître" en la matière, qui fut le premier à changer radicalement d'identité et d'aspect physique pour mieux se fondre dans le rôle de ceux qu'il voulait observer. C'est ainsi qu'en 1985-1986, il se fit passer pour un travailleur turc et embaucher en tant que travailleur immigré, afin de mieux comprendre leur réalité. Il en sortit un livre qui fit sensation, "Tête de Turc", où il relate les problèmes que rencontre cette population immigrée.
Aujourd'hui, il réédite avec éclat son expérience en livrant, dans son dernier ouvrage "Parmi les perdants du meilleur des monde" (éd la Découverte), huit récits d'immersion réalisés en se mettant dans la peau de travailleurs précaires embauchés en cette période de crise chez Lidl, Starbuck café, un centre d'appel, une entreprise de gastronomie fine. Enquête passionnante, quoique souvent à la limite de la déontologie, comme lorsqu'il se présente à une société de conseil comme dirigeant d'une entreprise qui souhaite savoir comment se débarrassser des syndicats pour mieux valoriser et revendre plus cher entreprise. L'enquête n'est plus seulement à charge, on peut se demander si elle ne dérape pas alors dans des scénarios de manipulation dignes des excès de Michael Moore.
ll n'en demeure pas moins qu'il a l'avantage, tout comme Florence Aubenas, de remettre en avant la richesse des informations obtenues par la technique de l'immersion. Car c'est en se plongeant dans le vécu des personnes qu'on observe, en partageant ensemble une expérience commune, qu'on comprend mieux leur vécu, en obtenant le plus souvent des confidences et des réflexions qu'on ne retrouve pas après coup.
L'immersion représente en ce sens une technique d'entretien tout à fait utilisable en étude qualitative, même si "l'expérience d'immersion" est forcément plus courte lors d'une étude, en ne représentant qu'un moment ponctuel de la recherche, qui se clôturera la plupart du temps ensuite par un entretien individuel classique destiné à se dévoiler et à faire le point sur les enseignements de la démarche.
C'est ainsi que, déjà dans les années 1990, nous nous étions glissés plusieurs jours de suite dans la peau et les habits d'ouvriers d'un Parc d'attraction pour mieux comprendre leur vécu, leurs attentes et les problèmes d'encadrement. Nous nous sommes également "immergés" dans des groupes de voyageurs d'un Tour Operator pour vivre de l'intérieur leur circuit de découverte d'un pays en 7 jours, en notant tous les problèmes, les insatisfaction et le vécu des clients, auxquels on ne dévoila que le dernier jour notre rôle d'enquêteur, en profitant de l'attente dans l'aéroport de retour pour passer un questionnaire à plus de 100 personnes. Sans compter les "immersions ponctuelles" qui permettent, lors d'une étude, d'accompagner une personne pendant qu'elle fait ses courses, ou pendant qu'elle conduit son automobile....
Après cette présentation des méthodes à base d' ethnologie et de vidéo, nous reviendrons lors nos prochains billets aux techniques qualitatives traditionnelles telles que les entretiens individuels, pour tenter de repérer les conditions d'un bon ou d'un mauvais entretien individuel....
11:12 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : enquêtes, sondages d'opinion, entretiens, qualitatif, réunions, florence aubenas, crise, adetem, marketing, tendances, sociologie, ethnologie, comportement consommateurs
09 février 2010
Crise, fidélisation à la marque et bilan d'image prospectif (le BIP)
La baisse de revenu et de pouvoir d'achat liés à la crise, amènent les consommateurs à adopter de nouveaux comportements : ils peuvent ainsi arbitrer d'une nouvelle manière les enseignes et les courses, sacrifier certains articles ou marques, changer de catégorie de produit, passer d'une marque nationale à une MDD, comme le montre en détail une étude ethnovidéo en soucription passionnante que nous avons réalisée avec FranceAgrimer (résultats disponibles en nous contactant).
Dans un tel contexte, la fidélisation à une marque devient un enjeu capital, le but étant de faire partie de ces "marques bastion" qu'on n'a pas envie de sacrifier, et d'éviter de glisser dans la grande masse indistincte des marques qu'on peut remplacer plus ou moins facilement, à moindre coût, par des MDD.
Or, contrairement à ce qu'on aurait pu penser, le prix est loin d'être le seul critère d'achat et de fidélisation. L'attachement affectif à la marque et la perception d'une réelle aspérité ou spécificité produit jouent tout aussi fortement, ce qui ouvre des dimensions intéressantes pour savoir comment, et surtout quoi communiquer de manière pertinente sur ses marques. Encore faut-il savoir comment on est perçu, avec quelles forces et faiblesses, quel capital affectif et quelle spécificité sont à valoriser.
Le BIP, ou Bilan d'Image Prospectif, permet de réaliser un check-up rapide et abordable de l'image d'une marque. Cette méthode a été mise au point pour accompagner les audits de consulting, en fournissant aux consultants une radiographie indispensable de la marque ou société à laquelle il s'intéressent.
La méthodologie repose sur des réunions de groupe de 3 à 4 heures, et se caractérise par un emploi privilégié de techniques projectives : portrait chinois, reportage imaginaire et prospectif sur la marque, scénario catastrophe et Rêve idéal, collages avec lecture sémiologique pour ne citer que quelques unes des techniques qui permettent de sonder indirectement le capital latent d'une marque.
Lorsqu'on ne peut réaliser un bilan de marque complet (avec une phase d'entretiens, puis de réunions de groupe, souvent couplés à des observations et à des analyses sémiologiques), le BIP s'avère un outil indispensable pour faire un point d'image sur les éléments positifs et négatifs de la marque, pour dégager le type de relation actuelle et souhaitable au consommateur. Elle permet de faire ressortir les leviers de fidélisation à actionner, ce qui est encore plus important en temps de crise !
Pour plus d'information: http://cccmquali.free.fr/bip_consulting.htm
15:30 Publié dans Méthodes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : études qualitatives, enquêtes, sondages d'opinion, quantitatif, qualitatif, crise, consommateur, tendance consommation, sociologie, anthroplogie de la consommation